La fiction raconte un monde plus proche de la réalité que celui décrit par les producteurs d'informations - force de l'époque. Et c'est tout son intérêt, son formidable potentiel. Dans les séries, les films et les romans, les personnages, plus complexes, plus hésitants, vivent et se développent grâce aux tensions qui prévalent entre leurs fragilités, leurs mauvais penchants et leurs bons sentiments, les voyous et les saints cohabitant dans les mêmes enveloppes charnelles, souvent tremblantes, toujours hésitantes. Les uns et les autres porteurs de morales variées, polymorphes.
Exactement comme dans nos vies intérieures, comme dans nos mondes extérieurs. Tout pareil. Victoire d'une société de fiction affranchie d'une structure narrative en trois actes qui pendant des siècles - à l'exception des mythes antérieurs aux monothéismes - reproduisit les manichéismes chers aux pouvoirs spirituels et ignora les vrais humains.
Car c'était pêché. De nos jours peu à peu, la presse et les flux d'information ont repris ce rôle. À travers les variétés des marketings éditoriaux en œuvre (et leurs inégales performances) se dégagent le même besoin quasi-religieux de trouver des voyous et des saints, de les séparer, de les distinguer, ainsi qu'une incapacité chronique à restituer une complexité.
Pour en sourire, pour prendre la fuite, ou plutôt pour prendre le soleil sur un banc avec un bon livre en main ; je vous conseille "Lucifer au chômage", d'Alexandre Wat, sorti chez L’Âge d'Homme. L'histoire de Lucifer qui débarque dans notre monde pour trouver un job mais zut toutes les places sont prises. Parce que le Mal loge partout et nulle part. Alors Lucifer devient acteur de cinéma...